"Université Léonardia - concept environnement"
Détails de la participation
- Récit introductif :
Université de Léonardia - L'arrivée
Au loin, la petite tour en suspension n’en finissait pas de dériver au gré du vent. C'était à se demander comment une chose sensément si lourde pouvait flotter.
« Défragmentation. C’est bien beau, mais… j’vais poser une question très con : si t’as cours dans cinq minutes... en sortilège. Mais qu’la salle de sortilèges se barre pile à ce moment : tu fais COMMENT ?! »
Ils marchaient à présent depuis quatre heures bien tassées dans une épaisse forêt de conifères. Le comble, pour des mages de bonne famille ! Leurs chausses toutes neuves en avait déjà fait les frais. Cependant, ce n’était ni par amour des paysages sylvestres, ni par envie de prendre leur temps que les jeunes écoliers vêtus de blanc et vert transitaient ainsi en longue file braillardes et colorées.
Un soupir sonore ponctua le silence qui suivit la plainte du grand jeune homme blond, dont le chapeau flambant neuf rasait les branches basses en bordure de chemin.
« Jask’, sérieusement ?! »
Une petite jeune femme à la foulée nerveuse trottait à ses côtés. Heureusement pour lui qu’une seule de ses foulées suffisait à compenser trois des siennes : il n’aurait jamais suivi le rythme autrement. Il darda un regard rêveur sur la petite Flamisphère flottante qui leur servait de guide sur ce premier trajet jusqu’à leur nouvelle maison : l’une des plus prestigieuses universités de magie, sinon la plus grande si on en croyait la publicité ! Qui avait néanmoins la fâcheuse particularité d’être séparée du réseau routier magique par deux rangs de montagnes sans âme qui vive. Des lieux en réalité réservé à toutes sortes d’entrainement et de tests pour la population locale… mais aussi territoire préservé d’espèces rares… et parfois dangereuses.
« Tu te présentes à l’un des plus grandes universités magiques, tu y es admis… et tu ne prends même pas la peine de lire la brochure en entier ?!
-J’aime pas les brochures. Et puis c’est toujours surfait, dans ces machins ! Genre, qui croirait que Chaudvent possède 118 salles de cours ? Imagine, même s’il y en avait que la moitié, il n’y aurait jamais assez d’élèves pour toutes les remplir !
-Il y en a 124 exactement, Jask’. C’est facile à vérifier.
-Pff… Comme si j’allais aller les compter moi-même !
-Et il y a encore plus d’élèves à Chaudvent qu’à Léonardia, en tous cas jusqu’à présent, alors c’est tout à fait crédible : tu ne pratiques pas le désenvoutement dans une salle dédiée aux expériences de spiritisme, c’est une sécurité élémentaire !
-Si tu le dis.
- Combien y a-t-il de marches sur l’escalier qui mène à la Grande Porte de Léonardia ?
-Quoi ? Mais qu’est-ce que j’en sais ?!
-Sept-mille-sept-cent-soixante-dix-sept : tu vas bientôt pouvoir le vérifier par toi-même, cette fois.
-Hein ?! C’est complètement ridicule, on va pas se taper sept mille marches !! J’ai déjà un trou à ma chausse gauche d’avoir emprunté ce fichu sentier pourri depuis le carrefour ! »
Laquelle n’allait d’ailleurs pas tarder à lui causer de belles ampoules.
« Même pas en rêve ! Il doit y avoir un téléporteur… ou peut-être une arche dimensionnelle pour arriver direct là-haut.
- Eh bien si tu avais pris la peine de te renseigner sur ta future école, tu connaîtrais la coutume instaurée par le fondateur Kontrolalt depuis l’ouverture de l’université, mon grand ! Tu saurais que « l’Art subtil de la métamorphose s'apprend dès le seuil de la vie » ! Et tu saurais que depuis des siècles, TOUS les premières années montent au château… à pieds.
-Non… C’est une blague… Sans déconner, non ! Non ! »
Sa large paume blafarde vint s’écraser sans grâce sur son faciès de beau gosse mal fagoté.
« Moi j’trouve qu’elle est pas con, sa question, fit soudain une voix grave dans leur dos. Y se passe quoi si on arrive dans les escaliers d’une tour en défragmentation ? On se change en brique ? »
La silhouette d’un jeune homme dissimulé partiellement sous la large capuche d’une cape sombre se détacha de l’ombre des arbres, sous le couvert desquels il semblait avoir cheminé un bon moment. Le regard étonné de Liarana accrocha deux yeux d’ambre cernés et fatigués, dans lesquels elle ne parvint à lire qu’une forme d’intérêt à peine amusé, et beaucoup de choses indistinctes. L’inconnu crut d’abord qu’elle allait lui sauter dessus pour se présenter en bonne et due forme : il détestait ça.
Mais ? Il n’en fut rien : elle se mit à marcher à sa hauteur et fit comme s’il avait toujours été là. Ce qui, en fait, était un peu le cas depuis dix bonnes minutes.
« Oh, alors dans ce cas, il y a deux possibilités, lui répondit Liarana avec un sourire qui tenait davantage du brossage de dents que de la joie sincère, primo : tu n’y vas pas, et tu attends que la défragmentation se soit terminée pour t’y rendre !
-Par-fait, ricana Jaskier, et tu te fais virer dans la foulée pour être arrivé avec quinze heures de retard après avoir ratissé toute la montagne pour la trouver ! T’en as d’autres des plans comme celui-là, miss géniale ?
- Je suppose qu’il doit exister un système de repérage pour les élèves, c’est évident. Secundo, enchaîna Liarana sans prêter attention à son sarcasme, tu te jettes dans les escaliers et tu te fais défragmenter avec ! Beaucoup plus classe et culotté !
-Ok, j’ai rien dit. Tu les débites au kilomètre, en fait…
-Et dans un tel cas, il ne te restera plus qu’à prier pour que ton pied ne soit pas transmuté en pierre, ta tête refragmentée à moitié avec un Vastécho qui trainait, ou ton estomac accidentellement homotéparléllélié avec un facteur exponentielle dix ! Dooonc, tu ne seras pas en retard – mais tu risques de regretter ta ponctualité le restant de tes jours. A toi de voir.
-Liarana, t’es formidable, tu sais ? Rien que d’y penser j’ai envie de gerber, alors que j’ai mangé y a pas deux heures ! Vraiment, merveilleuse journée d’intégration en perspective !
- Fallait pas poser la question. »
Après une telle saillie verbale dont elle semblait la seule à s’amuser, un silence résigné s’installa au sein du petit trio. Loin devant, un autre groupe d’élève les devançait d’une bonne demi-heure. Personne ne s’était retourné pour savoir si d’autres encore les suivaient, ou si, comme le craignait Jaskier, ils étaient bel et bien les derniers.
« Touchez pas les arbres, on sait jamais ce qu’il peut y avoir à l’intérieur, nota Kranos d’une voix blasée en voyant Jaskier se saisir d’une branche odorante,
-Oh. T’as peur de t’faire bouffer par un Mantodith ?
-Moi ? Je suis bien trop petite pour les intéresser… Toi, en revanche, y aurait matière !
-C’est ça ! Qu’ils essaient un peu ! »
Le visage souriant de Jaskier se retourna vers leur nouveau compagnon, qu’un voyage solitaire avait visiblement un peu éprouvé. Sa tenue détonnait avec les leurs : pas de chapeau vert pourtant demandé en fourniture, une simple cape de voyage ayant connu des jours meilleurs, et
« Au fait, moi c’est Jaskier, lâcha le grand blond à son homologue brun et trapu, et l’encyclopédie à lunette droit devant, c’est Liarana. Ne cherche jamais à arrêter le mécanisme quand elle est lancée, c’est peine perdue.
-Ahah ! Ok, c’est noté,
merci ! Moi c’est… c’est Kranos enchanté. Je… Je suis transféré depuis Grondark. J'suppose que vous avez dû en entendre parler. Je comprendrais si...
-Transféré ?! La vache, ça doit pas être facile ! Le dépaysement, la réadaptation, tout ça… Et puis tes amis, ta famille… Bah, j’suppose que toutes les grandes gueules du coin ont dû te le chanter sur tous les tons ? Hein. J’vais t’épargner ça, mon pote !
-Merci, c’est vrai que j’ai eu ma dose de bonnes blagues même en partant. Merci d’bien vouloir faire un bout de route… Vous êtes aussi en première année alors ? Tous les deux ?
-Eh ouais ! Sinon crois-moi, je s’rais déjà pénard à me prendre une vinassucrée perchée sur l’une de ces belles tours en lévitation ! J’comprends pas qu’on ait pas le droit de se téléporter direct là-bas.
-Les téléportations sont réglementées très strictement, voilà pourquoi ! Sinon n’importe qui pourrait pénétrer l’enceinte de l’université, bougre d’idiot ! Ne me dit pas que ça non plus, tu ne le sais pas ?!
-C’était pour rire, Lia’ ! Pète un coup, quoi ! C’est moi l’adulte, toi l’ado, et j’ai toujours l’impression d’être un gosse avec sa mère !
-Le jour où tu seras capable de me réciter toute l’histoire de Léonardia en alexandrin, Jask’. »
L’idée le fit rire. Puis, avec le peu de connaissances qu’il avait acquis sur la demoiselle depuis leur rencontre
« Attends. Tu peux vraiment réciter toute l’histoire de Léonardia en alex… ? »
Il réalisa alors que les deux jeunes gens venaient de stopper leur marche cadencée. Là, au milieu de la rangée d’arbres noirs qui encadraient le long sentier qu’ils avaient emprunté depuis les faubourgs de la capitale, apparut le paysage de l’autre versant. La vue, dégagée jusqu’à l’horizon, laissait champ libre aux regards de tous ceux qui, comme eux, faisaient cette découverte pour la toute première fois.
« Wow. »
Kranos, étonné, laissa un pli soucieux passer sur son large front, alors que sa collègue n’était plus que joie enfantine devant cette vision au soleil couchant.
« J’ai tellement hâte ! couina-t-elle, les larmes aux yeux d’avoir regardé l’éclat du ciel en face.
-Euh… attendez les gars… On va devoir se taper TOUT ça à PIEDS ?! C’est une blague ? »
Là où Liarana et Kranos n’avaient d’yeux que pour le panorama époustouflant que leur offrait leur point de vue, Jaskier calculait mentalement la distance colossale. Au pied de leur sentier, l’amorce solide d’un pont étrange, dont il jurait avoir vu les briques bouger. Au-delà, des kilomètres de forêts denses où serpentait encore et toujours la voie de vielles dalles qui les menaient, tels des pèlerins fidèles, jusqu’aux méandres d’un escalier colossal.
Léonardia : un nom qui avait sa place parmi les hauts lieux de l’Histoire du Monde Magique. Un chef-d’œuvre d’Hasarchitecture Transformationnelle, leg formidable du savoir-faire de ses deux improbables et fantasques fondateurs. Sous des airs de constructions on ne peut plus conventionnelle, la totalité du château juché sur les hauts plateaux de la forêt Sans Nom était en réalité un complexe enchevêtrement de diverses magies transformationnelles travaillant de concert. Fragmentation, métamorphose, homotéparléllélie, téléportation, transmutation : impossible de savoir quelle forme l’antique château allait arborer à votre réveil. Tel un gigantesque être vivant, Léonardia se mouvait sur, dans et au-dessus des montagnes, changeant de formes au rythme d’une mystérieuse respiration qui n’en finissait pas de fasciner. Liarana découvrait la silhouette si emblématique du donjon qui culminait sur le plateau face à eux. Elle devinait les dentelles de pierre encore invisibles à une telle distance. Et la porte, au sommet de laquelle trônait la mythique Chimère Léonardine, un artefact qui reproduisait le faciès terrifiant d'une créature mythique - au moins aussi puissant et apprécié que l’Harbre dont s’enorgueillissait Grondark.
C’est elle qui leur demanderait leurs noms, un à un, et en vertu de la Liste des Admis, les laisserait passer avec pour présent une mystérieuse sentence… ou les défragmenteraient vifs s’ils s’avéraient être des imposteurs. Mais de mémoire de Mages, personne n’avait plus tenté de tromper la Chimère depuis des temps immémoriaux. Liarana souhaitait seulement n’avoir jamais à vérifier cette légende.
Avec un contentement qui irradiait de tout son être, la plus jeune élève encore jamais admise en ces lieux quitta le promontoire à regret pour dévaler la pente droit devant. Chaud devant, Léonardia ! Oui, c'est très nul comme jeu de mots, mais il restera dans ma tête, pouffa-t-elle en pensées.
Mais foutrecul, pourquoi personne n’a prévu de transport magique pour traverser ces fichues montagnes ?! hurla mentalement le grand blond. A quoi leur servait-il d’être mages si c’était pour se trimbaler comme de malheureux non-mages sur des centaines de bornes ?
A cette heure déjà tardive, même un vieux train non magique aurait fait le bonheur du futur étudiant et de sa paire de chausses trop neuves.
Au vrombissement de l'air au-dessus de sa tête, il leva brusquement les yeux sur une énorme silhouette ailée qui les survola à toute allure. Son plumage étincelait sous les rayons enflammés du soleil couchant. Le jeune élève fixa la créature et son cavalier jusqu’à les voir disparaître derrière la cime des arbres. Une brève seconde d'étonnement, puis il reprit sa marche avec une mine proche de la déconfiture la plus totale : la distance qui leur restait à parcourir devait au moins égaler celle qu’ils venaient de franchir. Foutu Kontrolalt de mes …
Il resserra d’un coup les sangles de son bagage sur son épaule et rattrapa ses deux compagnons de marche en quelques foulées rageuses.
« J'savais bien qu’j’aurais dû demander un Hippogriffe à mon anniversaire. »
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Présentation du travail :
Voici ma toute première participation à un challenge DPS ! (Yess) J'ai déroulé pour la première fois en entier un process de concept art depuis zéro, et ce fut une super expérience. Pour les techniques utilisées : des croquis au traditionnel, puis du painting directement sous photoshop. Après deux essais infructueux, le concept posté ici est celui que j'ai jugé le plus abouti et que je suis aujourd'hui fier de pouvoir présenter au concours de fin d'année.
Le design retenu pour le château tourne autour de l'axe principal donjon-porte, puisque dans l'idée du concept que j'ai retenu pour cette proposition, tout le reste est en constante mutation : toutes les "pièces du puzzle" se réarangent en permanence ! Pour ce qui est du choix du point de vue pour l'image de présentation... Une personne de mon entourage m'a dit : "il faut que ce château soit suffisamment percutant et reconnaissable pour qu'on puisse le reconnaître à 10 bornes à la ronde !". (Bah oui, Léonardia, la fierté, la réputation, tout ça tout ça, pas question de le caser au fond d'une vallée, le bébé).
Du coup, eh bien... J'ai pris le truc au pied de la lettre et le château est effectivement à dix kilomètres de la caméra. Voilà, non, je ne m'excuserai pas pour ça.
Les extraits que je joins ici à ma
participation sont un mélange des divers documents m'ayant servi à composer l'image finale, et également un condensé de mes notes papiers que j'ai
remis au propre sur PS, afin d'illustrer globalement le processus et les idées explorées.
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Recherche de références :
Concept board résumé :
Vignettes de concepts :
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Super sujet, super brief, le mot de la fin pour remercier encore tous cieux et ciels qui se plient en quatorze pour proposer toujours plus de fun et rendre tout ça accessible. J'espère que vous vous éclaterez autant que je me suis éclaté ! Be magical !
Merci d'avoir lu, et une excellente nouvelle année 2023 !
Triste Comique pour Out-2022.